New York (Reuters) – L’écrivaine afro-américaine Toni Morrison, première femme noire lauréate du prix Nobel de littérature, est morte à l’âge de 88 ans. Elle est décédée lundi soir dans un hôpital de New York, le Montefiore Medical Center, ont précisé ses proches et son éditeur, Alfred A. Knopf.
Toni Morrison a « donné vie, par sa force visionnaire et ses emprunts poétiques, à un aspect essentiel de la réalité américaine », avait déclaré le jury du Nobel de littérature en lui attribuant sa récompense en 1993.
"Inutile de se ranger dans une catégorie définie."
Première et seule femme afro-américaine à avoir reçu le prix Nobel de littérature, Toni Morrison est morte à l'âge de 88 ans. Voilà le message qu'elle adressait aux jeunes diplômées d'une prestigieuse université américaine. pic.twitter.com/5k15lq8cHR
— Brut FR (@brutofficiel) August 7, 2019
Son roman « Beloved », inspiré de faits réels, a obtenu le prix Pulitzer en 1988. Situé pendant la Guerre de Sécession, le livre raconte l’histoire d’une femme qui tue sa fillette de deux ans pour qu’elle ne devienne pas esclave. La mère est arrêtée avant de pouvoir se donner la mort et le fantôme de sa fille, prénommée Beloved, vient lui rendre visite.
Une écriture libre, radicale, visionnaire mais aussi poétique pour une femme qui sera toujours restée fidèle à ses combats. Un certain regard sur l’Amérique aussi et une large reconnaissance internationale.
Au revoir Madame. #ToniMorrison pic.twitter.com/iuSbnyOaPY— Franck Riester (@franckriester) August 6, 2019
« Beloved » est le premier volet d’une trilogie consacrée à l’amour sous l’angle de l’histoire noire américaine. Il a été suivi de « Jazz », publié en 1992, qui raconte un trio amoureux dans le Harlem des années 1920, et « Paradise », paru en 1997. Née le 18 février 1931 à Lorain dans l’Ohio, Toni Morrison, de son vrai nom Chloe Anthony Wofford, était diplômée de la Howard University à Washington.
Le monde dans le regard de #ToniMorrison, un essai inédit publié en France cet automne https://t.co/tazYAcW4M1 via @Figaro_Culture pic.twitter.com/kEa7WZGAMw
— Olivier Delcroix (@Delcroixx) August 7, 2019
Elle a longtemps enseigné, travaillant aussi dans le milieu de l’édition, avant de faire paraître son premier roman, « The Bluest eye » (L’Oeil le plus bleu) en 1970, sur une fillette noire qui veut des yeux bleus, à l’âge de 39 ans. Elle expliquait être passée à l’écriture pour écrire « le livre que je voulais vraiment lire ».
« La littérature a le pouvoir de nous transformer comme la politique ne le pourra jamais. Et peu d’écrivains ont su utiliser ce pouvoir mieux que Toni Morrison »
— @KofiAnnan, ancien Secrétaire général, en compagnie de la #PrixNobel Toni Morrison au Siège de l’ONU en 2002. pic.twitter.com/VMLiVGRyhU
— Nations Unies (ONU) (@ONU_fr) August 6, 2019
« Je lisais tout le temps mais je ne me retrouvais jamais dans ces livres. Ou alors c’était comme une plaisanterie, comme une anecdote qui expliquait un trait du personnage principal sans que celui-ci ne me ressemble », ajoutait-elle lors d’un colloque en 2016.
Dans un entretien publié en 2017 dans la revue trimestrielle America, Toni Morrison précisait: « Le but, pour moi, était de réussir à écrire sans avoir un critique littéraire blanc juché sur mon épaule et qui approuvait ou non la moindre phrase que je venais d’écrire. »
Barack Obama lui avait décerné en 2012 la médaille présidentielle de la liberté, l’une des plus hautes distinctions civiles aux Etats-Unis.
« Toni Morrison était un trésor national », a écrit l’ancien président mardi. « Son écriture était non seulement magnifique mais pleine de sens: un défi à notre conscience et un appel à une plus grande empathie. Elle était aussi bonne comme conteuse, et captivante, en personne que dans ses livres. »